Le Conseil d’Etat annule le Décret relatif au résumé des caractéristiques du dispositif médical

Le Ministère de la santé ne peut restreindre la mise sur le marché et la mise en service d’un dispositif médical que ce soit au visa des Directives européennes encore applicables ou en prétendant anticiper l’entrée en application du Règlement européen sur les dispositifs médicaux.

C’est en substance ce qui a conduit le Conseil d’Etat à annuler le décret n° 2016-1716 du 13 décembre 2016 relatif au résumé des caractéristiques du dispositif médical suivant ainsi les arguments invoqués par le syndicat national de l’industrie des technologies médicales (SNITEM) auquel s’est associée MEDTECH in France.

Le Décret ici contesté précise le contenu du résumé des caractéristiques du dispositif médical, et ses modalités de transmission, que les fabricants ou leurs mandataires doivent communiquer  à l’ANSM. Le législateur français a instauré cette obligation à la charge des fabricants et mandataires, sous peine de sanctions notamment pénales, pour certains dispositifs dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de l’ANSM (i.e les dispositifs médicaux implantables et les dispositifs médicaux de classe III) à l’article L. 5211-4-1 du code de santé publique issu de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

Le juge administratif fait tout d’abord remarqué que le résumé des caractéristiques du dispositif instauré par les dispositions nationales contestées correspond en réalité au résumé des caractéristiques de sécurité et des performances cliniques du dispositif créé par l’article 32 du règlement (UE) 2017/745 du 5 avril 2017 qui impose sa communication à l’organisme notifié avant d’être mis à la disposition du public dans une base de données européenne.

Le juge en tire la conclusion que le législateur a instauré une obligation non prévue par les textes européens alors en vigueur, à savoir les Directives 90/385/CEE et 93/42/CEE.

La haute juridiction en tire les conclusions suivantes :

  • Le législateur français a créé une obligation supplémentaire faisant obstacle à la mise sur le marché et/ou à la mise en service des dispositifs concernés.

 

Ce faisant, il se place dans l’illégalité, cet obstacle à la libre circulation des biens au sein de marché intérieur étant strictement interdit par l’article 4 des Directives 90/385/CEE et 93/42/CEE.

  • Répondant ensuite au Ministère de la santé qui soutenait que l’article 14 ter de la Directive 93/42/CEE relatif aux mesures particulières de veille sanitaire permettait d’instaurer une telle obligation, elle relève qu’aucune disposition n’autorisait le législateur national à imposer aux fabricants la communication d’un tel document à l’ANSM dans l’attente de l’entrée en application du Règlement européen puisque l’article invoqué n’a pas pour objet d’autoriser la mise en place de dispositions transitoires en cas de modification des normes applicables, mais seulement de permettre à un Etat membre de prendre des mesures particulières nécessaires et justifiées restreignant ou interdisant la mise sur le marché du dispositif pour des impératifs de sécurité et de santé publique.

 

Le Conseil d’Etat ajoute que le Ministère ne pouvait soutenir avoir anticipé l’entrée en application de l’article 32 du Règlement (UE) 2017/745 qui a été adopté postérieurement au décret attaqué et dont, les dispositions transitoires, permettent seulement, par dérogation aux directives, la mise sur le marché de dispositifs médicaux conformes au règlement.

Cette décision sonne comme un rappel à l’ordre du législateur national qui ne peut édicter des dispositions contraires à la règlementation européenne.

Et l’on peut donc se féliciter de l’attention que porte le juge au respect de la hiérarchie des normes, ce que le législateur national et le pouvoir réglementaire semblent très régulièrement oublier.

L’obligation de produire et de transmettre un résumé des caractéristiques de sécurité et des performances cliniques non pas à l’ANSM mais à l’organisme notifié dans le cadre de l’évaluation de conformité entrera donc en application le 26 mai 2020. A noter que la Commission européenne a en la matière une compétence déléguée pour prescrire la forme et la présentation des données devant figurer dans le résumé.

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